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Le Transperceneige - La BD - L'intégrale

Le Transperceneige - La BD - L'intégrale

Le Transperceneige - L’intĂ©grale

AprĂšs avoir prĂ©sentĂ© la bande dessinĂ©e originale du Transperceneige, nous commençons par le premier livre qui est un regroupement des trois albums : Le Transperceneige, L’Arpenteur, et La TraversĂ©e. Bien que les trois aventures se suivent, j’essayerai de limiter les spoilers sur l’histoire.

Le Transperceneige

transperceneige Illustration © Casterman

Le Transperceneige est donc le premier album de la sĂ©rie, initialement prĂ©publiĂ© dans “(A Suivre)” et sorti en album en 1984.

AprĂšs une catastrophe environnementale qui a provoquĂ© une nouvelle Ăšre glaciĂšre, les restes de l’humanitĂ© survivent confinĂ©s dans un immense train long de 1001 wagons, le Transperceneige.

Proloff est un passager des wagons de queue, surnommĂ©s les “queutards”, et mĂ©prisĂ©s par les autres Ă  cause d’une rĂ©bellion de leur part qui s’est achevĂ©e en bain de sang. L’arriĂšre du train a fini par condamner l’accĂšs Ă  leurs wagons. Proloff est parvenu Ă  sortir de l’arriĂšre et s’est rapidement fait arrĂȘter par les militaires assurant la garde. Mis en quarantaine, il est rejoint par Adeline Boisseau, une jeune idĂ©aliste membre d’un collectif militant pour intĂ©grer les “queutards” au reste des passagers.

Contre toute attente, ils finissent par ĂȘtre convoquĂ©s par le Colonel Krimson. Pour le rejoindre, ils traverseront sous l’escorte des militaires diffĂ©rents wagons. Au fil de la remontĂ©e, ils dĂ©couvriront des wagons produisant des ressources considĂ©rĂ©es comme disparues par la majoritĂ© des passagers, Ă  destination des privilĂ©giĂ©s des wagons dorĂ©s.

Krimson voulait les voir car le train a pour projet de se sĂ©parer des wagons de l’arriĂšre. En effet, la motrice fatigue et ne parvient plus Ă  tracter toute sa charge. Il requiĂšre leur aide pour faire avancer les occupants des wagons de l’arriĂšre. Cependant, Proloff dĂ©couvre rapidement que Krimson a l’intention de sĂ©parer les wagons avec leurs occupants et se rebellera alors.

Le premier album du Transperceneige prĂ©sente dĂ©jĂ  plusieurs aspects qu’on retrouve dans la sĂ©rie TV. La sĂ©grĂ©gation, la lutte des classes, le survivalisme, les thĂšmes sont communs et abordĂ©s de la mĂȘme façon. On constatera Ă©galement que la foi quasi religieuse envers Wilford dans la sĂ©rie est originaire de l’ordre religieux de la Sainte Loco qui possĂšde un vĂ©ritable clergĂ© Ă  bord du Transperceneige.

Dans la BD, le train voyage depuis beaucoup plus longtemps que la sĂ©rie. Cela a bien Ă©videmment contribuĂ© Ă  agraver les comportements sociaux et on ressent tout au long de la lecture une sorte d’abandon gĂ©nĂ©ral. Il n’y a pas rĂ©ellement de sentiment d’espoir dans cette histoire, c’est trĂšs noir et le trait glacial de Rochette accentue constamment le dĂ©faitisme ambiant. Le Transperceneige est presque un tombeau roulant de gens qui voguent vers une mort inĂ©luctable. La premiĂšre classe est reprĂ©sentĂ©e d’une façon beaucoup plus dĂ©cadente par rapport Ă  la sĂ©rie oĂč la luxure, la prostitution, voire les orgies, sont monnaie courante, jouissant de ressources plus rafinĂ©es que l’autre partie du train. La traversĂ©e du train montre Ă©galement des wagons devenus des zones de non droit, oĂč mĂȘme les militaires font attention et ne s’aventurent que lorsque cela est nĂ©cessaire.

L’histoire pose Ă©galement de nombreuses questions complotistes. En effet, selon Proloff, le froid s’est abattu subitement et le Transperceneige Ă©tait dĂ©jĂ  prĂȘt Ă  embarquer de nombreuses personnes. L’origine de la catastrophe n’est pas rĂ©ellement connue et c’est l’activitĂ© humaine qui est principalement pointĂ©e du doigt, notamment une guerre nuclĂ©aire. Une image d’archive prĂ©sente le Transperceneige comme Ă©tant un luxueux train de croisiĂšre autonome rĂ©utilisĂ© pour ĂȘtre une arche de sauvetage, justifiant de sa capacitĂ© Ă  produire ses propres ressources. Cependant, les personnages de l’album n’ont pas beaucoup de connaissances de l’ancien monde et peu d’élĂ©ments d’archives seront prĂ©sentĂ©s, donc on ne sait pas rĂ©ellement si les informations donnĂ©es dedans sont vraies ou non. Proloff n’évoquera jamais avec les personnages les conditions des “queutards”, mais plusieurs phases d’introspection montreront une surpopulation bien plus Ă©levĂ©e que ce que la sĂ©rie TV ne prĂ©sentait. L’incident du suicide du doyen prĂ©sentĂ© dans la sĂ©rie Netflix est d’ailleurs originaire de cet album. Il s’agit de l’un des rares Ă©lĂ©ments que Proloff partagera Ă  Adeline. Enfin, on y retrouve le concept d’ingĂ©nieur en chef reclus dans la Locomotive que Proloff rencontrera lors de sa rĂ©bellion en s’enfuyant vers la motrice. La diffĂ©rence avec la sĂ©rie est qu’il ne s’agit pas du milliardaire industriel, mais du crĂ©ateur du concept de mouvement perpĂ©tuel qui s’est confinĂ© Ă  cause de ce qu’était devenu la population du train.

Un dernier aspect intĂ©ressant de l’écriture est qu’elle est ponctuĂ©e de quelques rimes de poĂ©sie. Les cases de narration sont toutes Ă©crites en vers, racontant l’éternel voyage du Transperceneige.

L’Arpenteur

larpenteur Illustration © Casterman

L’Arpenteur est le premier album de la suite Ă©crite en 1999 par Benjamin Legrand, et toujours mis en image par Jean-Marc Rochette. Le trait de ce dernier est diffĂ©rent du dessin de 1982. Les planches du Transperceneige Ă©taient proches du monochrome et les traits taillĂ©s au couteau. Ici, Rochette prend un style noir et blanc avec des dĂ©gradĂ©s de gris. Le trait est plus flou et proche d’une peinture, mais alterne aussi avec des lignes nettes et franches.

Le CrĂšve-Glace a perdu tout contact avec le Transperceneige depuis quelques temps et vit dĂ©sormais dans la peur d’une collision. Pour s’y prĂ©parer, le Conseil en charge du train a dĂ©cidĂ© de mettre en place les exercices de freinages. Profitant de l’arrĂȘt du train, ils envoient des explorateurs en extĂ©rieur, les Arpenteurs. Lors de cette premiĂšre sortie, seul un survivant parviendra Ă  rentrer et disparaĂźtra de nouveau. Dix-sept ans plus tard, Puig VallĂšs est un Arpenteur qui se prĂ©pare Ă  participer Ă  un nouvel exercice de freinage. DĂ©sobĂ©issant Ă  un ordre durant l’exercice, il est alors en reprĂ©sailles faussement accusĂ© de la mort d’un de ses coĂ©quipiers et se voit condamner Ă  des travaux d’intĂ©rĂȘt gĂ©nĂ©raux. Qui sont en rĂ©alitĂ© des missions suicides.

Puig est envoyĂ© Ă  bord d’un avion Ă  l’extĂ©rieur du CrĂšve-Glace pour observer la voie ferrĂ©e Ă  une distance que les Radaristes du train ne peuvent voir. Il dĂ©couvrira que le pont par lequel ils doivent passer est dĂ©truit et reviendra pour avertir le train. Cependant, le Conseil voulant sa mort, ils ignoreront la communication et refuseront sont retour, tentant mĂȘme de l’abattre avec les tourelles du train. Puig menacera alors de s’écraser contre le train et de le faire dĂ©railler. Sa communication sera alors retransmise dans tous le train par Val, sa petite amie et fille du conseiller Kennell, ce qui obligera le Conseil Ă  revoir sa position. Manipulant l’information, ils feront de Puig un sauveur du train ayant alertĂ© du danger imminent. Pour conserver son silence, ils l’intĂšgreront au Conseil et Puig dĂ©couvrira alors les nombreux mensonges Ă©mis par le gouvernement autocrate du train et son clergĂ©.

L’Arpenteur reprend en grande partie les concepts de base du Transperceneige en les dĂ©veloppant un peu plus. Le CrĂšve-Glace est dirigĂ© par un Conseil comprenant un “prĂ©sident” non Ă©lu, le reprĂ©sentant du culte de la Sainte Loco, le chef de l’armĂ©e, et autres. Ce Conseil ment constamment et maintient l’ordre par la peur de la collision avec le Transperceneige, muet et considĂ©rĂ© comme errant sur les voies, en rĂ©pĂ©tant ses exercices de freinage pour contrĂŽler la population. En plus de ça, il a mis en place un loto avec lequel les passagers peuvent gagner des voyages en rĂ©alitĂ© virtuelle rĂ©alisĂ©s par Val Kennell, la fille du prĂ©sident. Celle-ci ignore complĂštement toutes les machinations de son pĂšre et du Conseil, pensant exprimer son art.

C’est dans L’Arpenteur et ses suites que sont introduits les tiroirs prison qu’on dĂ©couvre aussi dans la sĂ©rie TV. Le CrĂšve-Glace disposant un gouvernement dictatorial, il y enferme ses diffĂ©rents opposants ou autres Ă©lĂ©ments gĂȘnants quand il ne fait pas d’exĂ©cution sommaire. Parmi les autres Ă©lĂ©ments ajoutĂ©s, il y a des expĂ©riences faites sur des enfants en vue de renforcer leur tolĂ©rance au grand froid et espĂ©rer faire Ă©voluer leur code gĂ©nĂ©tique de maniĂšre Ă  pouvoir vivre dans les conditions extrĂȘmes de la planĂšte. Dans cet opus, nous retrouvons les mĂȘmes conflits sociaux mĂȘlĂ©s Ă  beaucoup plus de politique mais aussi Ă  du complotisme. En plus du culte de la Sainte Loco qui est ici beaucoup plus exacerbĂ© qu’à bord du Transperceneige se trouve une autre secte connue sous le nom des Cosmosiens. Ceux-ci prophĂ©tisent une thĂ©orie selon laquelle ils ne sont pas Ă  bord d’un train mais d’un vaisseau spatial Ă  la recherche d’une nouvelle planĂšte habitable. Les exercices de freinage Ă©tant, selon eux, des arrĂȘts sur des astĂ©roĂŻdes pour collecter des ressources. Le groupuscule le plus extrĂȘmiste ira jusqu’à faire un attentat pour prouver ses dires.

Les conspirations politiques Ă©tant au coeur de l’histoire de L’Arpenteur, celle-ci se dĂ©veloppera forcĂ©ment sur une rĂ©bellion et un Ă©clatement de diverses mouvances politiques, qui se dĂ©veloppent dans l’album suivant.

La Traversée

latraversee Illustration © Casterman

La TraversĂ©e est la suite directe de L’Arpenteur, elle est sortie en septembre 2000 et toujours rĂ©alisĂ©e par le mĂȘme duo.

Le CrĂšve-Glace a dĂ©tectĂ© un signal radio diffusant de la musique qui semble provenir de l’autre cĂŽtĂ© de l’ocĂ©an gelĂ©. Puig VallĂšs dĂ©cide alors de suivre ce signal car il pense qu’il doit s’agir de survivants. En sortant les chenilles installĂ©es sur la motrice et une dizaine de premiers wagons, et se sĂ©parant du reste du convoi, le CrĂšve-Glace sortira de son chemin tracĂ© pour suivre ce fameux signal.

Cependant, cette aventure ne sera pas de tout repos. Les conditions de vie à bord se dégradent et des révoltes grondent de plus en plus.

Si L’Arpenteur a prĂ©sentĂ© la poudriĂšre, La TraversĂ©e en est l’allumette qui fera tout exploser. La rĂ©volte est d’une grande violence et la pression des diffĂ©rentes parties prenantes de l’histoire se ressent bien. On assiste Ă©galement Ă  un conflit qui est non seulement politique, mais religieux car les prĂȘtes de l’ordre de la Sainte Loco prĂȘchent constamment au retour sur les voies pour suivre leur chemin sacrĂ©. On notera que le signal radio musical a Ă©tĂ© repris aussi dans la sĂ©rie TV de Neflix lors du dernier Ă©pisode pour amorcer la seconde saison de la sĂ©rie.

Pour conclure ce billet sur L’IntĂ©grale du Transperceneige, je dirais qu’il s’agit d’une oeuvre de science fiction se dĂ©roulant un univers post-apocalyptique trĂšs noir. La sĂ©rie TV est certes trĂšs pessimiste, mais l’ambiance de celle-ci est, malgrĂ© la forte violence de certains passages, Ă  cent lieux de la morositĂ© constante de la bande dessinĂ©e. La combinaison du scĂ©nario prĂ©sentant un train roulant sur les rails du dĂ©sespoir et de l’abandon couplĂ© Ă  un dessin froid et prĂ©sentant des visages systĂ©matiquement graves donne une expĂ©rience narrative perturbante
 Mais aussi prenante. La lecture s’enchaĂźne et bien qu’on ait souvent une idĂ©e du dĂ©roulement des Ă©vĂ©nements, on a envie de continuer pour savoir jusqu’oĂč cette histoire va aller.


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